PARTIE 1 :

Impactant, intriguant, interpelant… les titres doivent capter l’attention des lecteurs tout en restant précis et adaptés au genre de l’article. Ces principes d’écritures s’appliquent aujourd’hui autant à la rédaction sur Internet que sur support papier. L’objectif ? Déclencher une irrésistible envie de lire et de connaître la vérité. Un rôle majeur qui parfois a permis de changer l’histoire, de réécrire les destinées, comme ce fut le cas avec « J’Accuse… ! » titre emblématique dont le choix fut lui aussi, une épopée.

Les titres, un critère de choix de lecture des articles

Les titres déterminent jusqu’à 80% du nombre de lectures que reçoivent vos articles. Bien les choisir est donc une question essentielle si vous voulez capter l’attention, et ce, que votre support soit papier ou numérique.
Comment faire ?
Premièrement, vous devez utiliser des mots simples et compréhensibles par tous. Ensuite, choisissez d’en dire le plus possible avec peu de mots pour donner envie au lecteur d’entrer dans les détails de l’article.

Pour essayer de trouver le titre parfait, faire preuve d’exactitude est également essentiel car votre lecteur potentiel a des attentes claires. Il cherche une information pour répondre à un besoin ou à un problème rencontré dans la réalité. Pourtant attention. Si votre titre crée des attentes élevées dont le contenu n’est pas à la hauteur, vous perdrez la confiance de vos lecteurs. Un bon titre doit donc aussi être suivi d’un bon article.

Du gros titre à l’intertitre, un procédé pour gagner en efficacité

Sur le web, si vous écrivez un mauvais titre, votre article ne sera pas lu, même si vous avez le meilleur contenu qui soit. À ce titre (c’est le cas de le dire), les statistiques sont parlantes : un seul visiteur sur 5 lit véritablement les articles. La raison ? Les internautes, noyés sous l’information, sont très sélectifs et optimisent leur temps de lecture. Ce sont donc bien les titres qui influent la décision de cliquer sur un lien (ce qui ne prend que quelques secondes). De plus, pour encourager une lecture complète, que cela soit pour un article web comme un article papier, nous vous conseillons de rédiger des intertitres dans vos articles au-dessus de vos différents paragraphes. Vous proposez ainsi à votre lecteur une vision toujours globale mais plus précise du contenu.
Nous pourrions diviser le chemin de lecture ainsi : un gros titre pour cliquer, des intertitres pour le guider dans le déroulé de sa lecture. Pensez-y pour augmenter de façon significative le nombre de visites mais aussi de lectures sur votre site !

Une technique inspirée du papier

Ce procédé très efficace est depuis longtemps utilisé dans les journaux ou les magazines en physique, il ne faut pas hésiter à l’utiliser pour guider votre lecteur ! Dans les supports à pages, les titres (en plus du gros titre de la une) sont également mis en première de couverture et en dernière de couverture afin d’offrir au lecteur un panorama le plus complet possible de tout le contenu du journal. Ils sont accompagnés d’un petit chapeau résumé (introduction) et du numéro de page correspondant.
Ainsi, avant même la lecture d’un article, tout est fait pour que lecteur, d’un simple coup d’œil, puisse avoir tout en main pour lire d’abord ce qui l’intéresse.

Des titres à peaufiner quel que soit votre support

Sur le web ou sur papier, un bon titre se peaufine dans la forme. Amusez-vous avec des allitérations, des expressions parlées, des guillemets, des termes forts…

Toutes ces figures de styles rendront vos écrits encore plus attrayants avec un impact à la fois subtil et fort sur votre lecteur. Ensuite, montrez clairement leur valeur via une mise en page dynamique, des typographies grasses, voire colorées. Cela rendra l’ensemble encore plus spectaculaire ou revendicateur. Un cocktail d’une redoutable efficacité qui fut, le 13 janvier 1898, utilisé par le journal L’Aurore pour mettre en valeur l’article d’Emile Zola prenant la défense du capitaine Dreyfus. Une histoire que nous vous racontons dans la deuxième partie de cet article.

PARTIE 2 :

Impactant, intriguant, interpellant… les titres doivent capter l’attention des lecteurs tout en restant précis et adaptés au genre de l’article. Après quelques conseils techniques, dans notre partie 1, nous revenons sur l’influence d’un bon titre qui peut aller jusqu’à devenir un événement historique, comme ce fut le cas avec le célèbre « J’Accuse » d’Emile Zola. Evènement dont nous vous révélons ici les coulisses…

Zola, le sous-doué des titres d’articles ?

C’est en 1897 que Zola, révolté par l’injustice et les réactions insultantes de la presse nationaliste, décide d’écrire plusieurs articles en faveur du mouvement dreyfusard. Le premier, intitulé « M. Scheurer-Kestner » paraît dans Le Figaro, le 25 novembre 1897 et se veut un plaidoyer en faveur de l’homme politique courageux qui se dresse contre l’injustice de la condamnation du capitaine Dreyfus. Deux autres articles suivront intitulés « Le Syndicat » et « Le procès-verbal ». Des articles, qui, s’ils soulignent l’engagement et le parti pris de l’écrivain, n’obtiennent pas encore l’effet escompté. Politiques, artistes et militaires, personne dans la sphère publique n’est encore impressionné par cet engagement résolu mais d‘apparence modérée. La faute à de mauvais titres ?
Mauvais titres ou non, ces articles ferment les colonnes du Figaro à Zola qui se tourne alors vers L’Aurore pour diffuser un nouveau texte. À la lecture de ce dernier, l’ensemble de la rédaction approuve le contenu mais bute sur sa mise en valeur. Son titre « Lettre au président de la République » reste une accroche dans la même veine que les précédentes : un peu fade, terne et pas très entraînante. Apparemment, Zola grand écrivain était plus doué pour titrer ses livres que ses articles.

Georges Clémenceau et Ernest Vaughan ou l’art de l’accroche

Georges Clémenceau et Ernest Vaughan s’emparent alors du sujet. Pour eux, le titrage de l’article de « une » doit pouvoir se lire facilement, d’assez loin, sur des affiches, et pouvoir se crier dans la rue. Le premier titre de Zola un peu trop long ne répondait pas à ce critère et c’est Clémenceau qui met tout le monde sur la voie en faisant remarquer que Zola indique son titre dans l’article : c’est « J’Accuse … !»

En plus de pouvoir être crié, ce titre répond dans le même ton à la presse du soir, bon marché, orientée sur le fait divers. Une presse majoritairement antidreyfusarde, dont l’usage est de titrer en très grosse force de caractère.
C’est une forme de marque de fabrique, par opposition à la grande presse d’opinion qui titre à la colonne. C’est d’abord contre cette presse du soir contre laquelle Zola s’insurge, et en utilisant l’un de leurs artifices, il s’adresse aussi à son lectorat.

J’Accuse… ! Un choix audacieux

Ce sera donc « J’Accuse… ! ».
Un titre formé d’un simple verbe, en deux syllabes. À noter, la composition typographique particulièrement soignée et révolutionnaire pour l’époque. Deux majuscules initiales et trois points de suspension suivis d’un point d’exclamation renforcent l’aspect dramatique de la proclamation.
Un concept graphique qui aujourd’hui peut sembler un peu désuet mais qui, à l’époque, a marqué les contemporains de l’Affaire, avec un impact qui peut être comparé aujourd’hui aux logos de nos plus grandes marques.
Le titre barre tout le haut de la première page. Il est suivi du titre initialement choisi par Zola, dans un corps de caractère plus petit (sous-titre). Puis, enfin, le nom de l’auteur du texte. C’est un fait rare car à cette époque, il n’était pas d’usage de signer au début d’un texte, mais cette entorse aux usages s’est avérée nécessaire car le titre étant à la première personne, il était indispensable d’identifier immédiatement l’auteur de l’accusation.

Les effets d’un bon titre

Contrairement à ces précédents articles ayant suscité peu d’intérêts et de réactions, J’Accuse… ! fit l’effet d’une bombe. Cinglant et volontairement vindicatif, le titre dès le départ inverse la logique jusqu’ici bien huilée de l’affaire et laisse transparaître le contenu de l’article : une prise de position forte et argumentée, qui finit par transformer les accusateurs en accusés. Pour L’Aurore c’est l’heure de gloire. D’un modeste quotidien de 30 000 exemplaires, son tirage passe au-delà de 200 000 pendant toute la durée de l’affaire. Mais on ne saura jamais vraiment quel a été le tirage exact de l’édition de J’Accuse… ! (sans doute entre 200 000 et 300 000 exemplaires).

Conséquences, Zola sera traîné dans la boue et calomnié mais son article lui permettra d’accéder à la postérité en passant de l’image de l’écrivain sage et plutôt rangé, au pourfendeur des injustices et des inégalités.

Pour Dreyfus, l’article relancera l’affaire et finira par aboutir à la révision de son procès. Mais ceci est, à plus d’un titre, une autre histoire…